Oscar Tessonneau

J’aimerais que la littérature s’incruste dans mon existante

Oscar aime les mots, et la Politique. Avec un grand P, comme Programme, et non avec un petit p comme petites phrases de com.

Il est passionné, même. Ses mots sont au service de sa vision d’une société plus juste, mais il ne s’arrête pas là: il agit.
Il m’a d’abord contactée dans le contexte de son action contre son récent employeur, pour discrimination. Puis nous nous sommes vus au Salon AutiChance. Sa détermination me touche, c’est une qualité rare, et j’ai beaucoup de respect pour les personnes qui se battent pour bâtir le monde de leur rêve.

Alors j’ai eu envie de faire son portrait, le voici.

[Note: Cet interview n'est pas une tribune politique, mon blog est politiquement neutre. J'ai mes opinions et mes analyses, et la politique en tant que vision de la société est un domaine important pour moi depuis l'âge de 14 ans environ, mais je ne les partage pas dans ce blog. Les opinions exprimées ici sont celles d'Oscar.]

Interview

Ecriture et politique semblent être tes 2 passions. Comment définis-tu ton blog « La Nouvelle Expérience », quel est son objectif?
La Nouvelle Expérience est avant tout un média d’actualité internationale. Une sorte de minuscule France 24, sans les reportages audios, télés et vidéos si tu préfères. Je l’utilise pour travailler sur des questions en lien avec le maintien de la liberté de la presse dans plusieurs pays ou la défense des droits fondamentaux comme la liberté d’expression ou la séparation des pouvoirs dans des régimes démocratiques libéraux tels qu’Israël, les États-Unis et les pays de l’Union Européenne. Donc, mon objectif principal est de susciter une prise de conscience de ces problèmes démocratiques et de fournir une plateforme pour discuter de solutions potentielles à ces problèmes, qui sont aussi liés à des sujets militaires et stratégiques.

A titre d’exemple, j’ai récemment travaillé sur les réformes politiques menées par des dirigeants tels que Netanyahu. Il y a trois semaines, j’ai beaucoup apprécié le long dossier des journalistes d’investigation du Point sur la dérive autoritaire du Président Tunisien Kais Saied. Les récentes réformes de ces dirigeants ont considérablement restreint les pouvoirs des parlements et des députés. Ils ont également remis en question la séparation des pouvoirs, un principe fondamental, hérité des lumières et plus particulièrement de la philosophie de Montesquieu, auquel je suis très attaché.

Enfin je m’intéresse beaucoup aux partis et aux groupes qui luttent pour leurs droits partout dans le monde, comme les Kurdes du PKK et les Palestiniens.

Lorsque je traite l’actualité française, je m’intéresse particulièrement aux questions militaires comme la LPM 2024-2030 et la gauche. J’écris régulièrement des notes sur les questions en lien avec la liberté de la presse pour un parti politique membre de La Nupes, et j’ai également la chance de rencontrer des élus de ce parti, tels que Patrick Kanner et Jean-Luc Mélenchon, lors de manifestations contre la réforme des retraites.

Tu es également pigiste auprès de Handicap.fr. Peux-tu nous en dire plus ?
J’ai croisé la route de quelques journalistes de cette rédaction, lorsque j’étais attaché de presse dans une agence de communication parisienne. Lorsque j’ai décidé de prendre mon destin en main, de quitter le confort de cette agence et de révéler à la rédaction de Mediapart les discriminations que j’y subissais, car je suis autiste et dyspraxique, j’ai souhaité me lancer dans une aventure qui me tenait à cœur depuis longtemps : celle de devenir journaliste. J’ai donc décidé de chercher un stage dans une rédaction, afin de me former à des techniques d’écriture que le journaliste ayant enquêté sur mon agence à Mediapart m’a expliquées. Aujourd’hui, je travaille également avec un journaliste de France Info pour me former aux reportages télés et radios. Vous savez, c’est un domaine où il faut apprendre à tout faire, à écrire, à filmer, à monter, à commenter, à poser les bonnes questions, à dénicher les bonnes sources. C’est un métier passionnant, mais exigeant, qui ne laisse pas de place à l’à-peu-près. Et pour intégrer les écoles de journalisme les plus réputées que je vise, il est nécessaire de justifier d’une expérience en rédaction. C’est ainsi que j’ai décidé de tenter ma chance en tant que pigiste pour Handicap.fr, en leur proposant des sujets qui pourraient éclairer d’un jour nouveau les réalités de l’autisme et de la dyspraxie.

Quelle est la place de la musique dans ta vie ?

Effectivement, la musique a toujours eu une place très importante dans ma vie, depuis que j’ai commencé à m’intéresser à cet art à l’âge de 14 ans. Mon père et mon oncle, deux musiciens de rock ayant une renommée départementale voire régionale, ont joué un rôle important dans mon initiation à la musique. J’ai ainsi eu l’occasion d’assister à de nombreux concerts, de rencontrer des musiciens, et de m’imprégner de l’univers de la musique rock.
C’est vers l’âge de 16 ans que j’ai commencé à jouer de la guitare et à composer mes propres chansons. J’ai alors développé une passion assez compulsive pour les songwriters anglo-saxons, comme Bob Dylan, Jeff Buckley, Sufjan Stevens, ainsi que pour des groupes folks comme Band Of Horses, The National et Fleet Foxes. Dans mon prochain roman, que j’enverrai bientôt à des auditeurs, je reviens beaucoup sur l’influence que des cd comme Either/Or d’Elliot Smith, qui était également autiste, ont eu sur ma vie.

Quels sont tes autres talents et intérêts spéciaux ?
Je suis quelqu’un qui adore les imitations. J’adorais imiter mes professeurs d’université lorsque j’étais à la fac. C’est mon côté un peu beauf. Par exemple, lorsque j’étais plus jeune, j’écoutais de manière assez compulsive les imitations de Patrick Sébastien et Johnny Hallyday faites par Laurent Gerra sur RTL et France 2. J’ai également une mémoire assez incroyable. A titre d’exemple, je me souviens de chaque expression drôle que mes professeurs de lycée sortaient régulièrement en classe comme « Sortez les violons et les kleenex » ou bien encore « ça sent le sapin ». Cela m’a beaucoup aidé lorsque j’ai écrit 2015, mon nouveau roman qui a récemment été envoyé à plusieurs éditeurs.

Mediapart a récemment publié un article sur ton expérience douloureuse dans une Agence de Communication. Quelles conséquences constructives tires-tu de cette expérience ?

Il est vrai que l’enquête publiée par Mediapart sur mon expérience n’a pas eu l’impact que j’espérais. Néanmoins, tout cela m’a permis de constater que nous vivons une époque où les décideurs sont des influenceurs « LinkedIn et Twitter », pour reprendre une expression de Fabien Roussel. Ils font de beaux discours sur l’égalité, la diversité et la non-discrimination, mais agissent peu pour réellement changer les choses. En tant que pigiste, j’ai eu l’occasion de constater à plusieurs reprises que les injustices, les discriminations et les abus peuvent être ignorés ou minimisés par les personnes en position de pouvoir. Tout cela me révolte.

Un exemple concret de cette réalité est l’article de Prisca Borel publié dans Mediapart sur les ESAT. Ce reportage poignant met en lumière la situation dramatique de milliers de personnes travaillant dans ces établissements, appelées « usagers » et non des travailleurs, et qui sont exclus du Code du travail. Malgré la gravité de la situation, aucune réaction significative n’a été observée de la part des élus ou des professionnels de la santé. Ce constat m’amène à réaliser que la prise de conscience des problèmes de notre société est loin d’être suffisante. Les discours et les déclarations d’intentions ne suffisent pas, il est indispensable de mettre en œuvre des actions concrètes pour lutter contre les injustices et les discriminations. Ce matin j’ai échangé avec plusieurs élus parisiens sur le sujet via des boucles WhatsApp. Ils ont tous préféré saluer les progrès fait par les travailleurs des Esat, avant de souligner la discrimination qu’ils subissent dans ces structures.

Quels sont tes projets ?
Devenir journaliste d’enquête dans le pôle emploi/handicap/rh ou politique internationale d’une rédaction française comme Mediapart, Le Monde, L’Obs ou Libération. Je m’intéresse également à Factuel, un nouveau média développé par Christine Kelly, bien que je me méfie de cette présentatrice ayant présenté Face à L’info, une émission où les accords passés entre Cnews et le CSA n’ont pas été respectés.

Qu’aimerais-tu dire à un.e autiste qui rêve de vivre de ses talents ?

Je l’invite à réellement développer ses intérêts spécifiques, ainsi qu’à faire beaucoup d’efforts pour rester en contact avec la société. Je suis conscient que l’insertion professionnelle des autistes est un véritable défi, puisqu’il est difficile pour nous d’effectuer des tâches répétitives et simples qu’un manager ou des collègues nous demandent d’effectuer, et que, dans une économie néo-libérale où la productivité et les bénéfices sont les seules choses obsédant les entreprises, les « métiers passions » se construisant sur le temps long sont souvent très précaires.

J’ai d’ailleurs rédigé une question de gouvernement avec une attachée parlementaire de Guillaume Vuilletet, député de l’Oise, afin qu’on mette en place des quotas d’autistes dans les maisons d’édition, les boites de production, les labels ou les centres de recherche scientifiques, afin qu’ils puissent être prioritaires dans les métiers où ils excellent : compositeur, arrangeur, écrivain, journaliste, chercheur en sciences dures, ou que sais-je encore. Grâce à cette contribution, La France aura peut-être son nouvel Erik Satie, lui-même probablement autiste, ou un compositeur aussi virtuose que Berlioz ou Ravel.

Je les invite également à consulter régulièrement des CMP. Je l’admets, la majorité des psychiatres sont complètement nuls. Dans un système ultralibéral où l’hôpital public n’a plus de moyens, ils préfèrent mettre des autistes sous neuroleptiques, les éloigner de la société, et ne pas leur expliquer les réels problèmes qu’ils rencontrent lorsqu’ils doivent communiquer une information simple comme un conseil, ou dire merci à quelqu’un qui a été gentil avec eux. Je les invite à se rebeller s’ils constatent des abus.


Oscar Tessonneau, journaliste autiste

Oscar Tessonneau

Contact: tessonneauoscar@gmail.com

LinkedIn: /oscar-tessonneau-2a814417a
Twitter: @otessonneau
Facebook: /oscar.ghrol
Instagram: /oscar_tess_
Soundcloud: /oscartess

Blog : La Nouvelle Expérience
Livre: Un premier roman à 19 ans (plus disponible) et un livre en cours.

Articles:
Pour une meilleure gestion des troubles psycho-moteurs à l’école et l’université

Contributions:
Revue compendium 3 – Double -Trouble

Media:
Tintamarre . Mediapart


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